Des chercheurs obtiennent des images 3D de l'irrigation sanguine de l'oreille interne

Des chercheurs suédois viennent de cartographier l'irrigation sanguine de la cochlée, située dans l'oreille interne, pour mieux comprendre certaines atteintes auditives et mieux adapter les implants. 
 

Publié le 16 avril 2020

Des chercheurs obtiennent des images 3D de l’irrigation sanguine de l’oreille interne

Des chercheurs de l’université d’Uppsala, en Suède, ainsi que leurs partenaires scientifiques canadiens, ont réussi à cartographier les vaisseaux sanguins de l’oreille interne. L’étude, qui a été publiée dans la revue Nature, a pour but de présenter la première image 3D de l’approvisionnement en sang du ganglion spiral, un élément clé de la cochlée. Ils ont utilisé l’imagerie par rayonnement synchrotron, en combinaison avec des analyses de coupes cochléaires humaines d’archives pour obtenir la représentation.

Une technologie novatrice

Comme le stipule l’étude, les ganglions spiraux humains, situés dans la partie osseuse de la cochlée, dépendent de la richesse de leur alimentation en sang pour maintenir leur niveau d’excitabilité. Ces ganglions sont d’ailleurs ciblés par l’implantation cochléaire pour traiter la surdité, et leur viabilité est essentielle pour garantir des résultats cliniques réussis. L’approvisionnement en sang du ganglion spiral est difficile à étudier en raison de sa structure hélicoïdale et de son enrobage dans l’os temporal.

Cette découverte a donc été possible grâce à l’utilisation d’une technologie bien particulière, les rayons X du synchrotron. En effet, les chercheurs ont utilisé le système synchrotron (l’un des huit existants dans le monde) du Centre canadien de rayonnement synchrotron de Saskatoon au Canada. Cette installation, aussi étendue qu’un terrain de football, accélère les particules à très haute énergie, ce qui permet de créer des images des plus petites parties de l’oreille interne.

Grâce au traitement informatique, les images peuvent ensuite être représentées en trois dimensions. Les données ont été traitées à l’aide d’un logiciel de rendu en volume. Un modèle tridimensionnel représentatif a ainsi été créé pour permettre la visualisation de l’anatomie vasculaire.

« Nous devons mieux comprendre la micro-anatomie de l’organe auditif humain et la façon dont les électrodes utilisées affectent les structures de la cochlée. Cela peut conduire à une meilleure conception des électrodes et à de meilleurs résultats auditifs. Les reconstructions en 3D signifient que nous pouvons étudier de nouvelles voies chirurgicales vers le nerf auditif », explique Helge Rask-Andersen, professeur en otologie expérimentale au département des sciences chirurgicales de l’université d’Uppsala et co-auteur de l’étude.

 

Des résultats étonnants

Au total, vingt-six os temporaux de personnes décédées ont ainsi été testés. Les résultats ont révélé que le ganglion spiral est alimenté par des rameaux vasculaires radiaux qui sont séparés du reste de l’oreille interne et enfermés dans l’os. Contrairement à la plupart des organes, les artères et les veines de la cochlée humaine ne suivent pas les mêmes conduits. Il existe un double écoulement. Cette organisation peut expliquer la viabilité du ganglion spiral chez les receveurs d’implantation cochléaire, même en cas de pathologie cochléaire avancée. L’écoulement veineux est également susceptible d’être endommagé lors de l’insertion de l’implant cochléaire.

 

Traiter la surdité et les autres pathologies auditives

Toujours selon l’étude, les rayons X synchrotron pourraient aider à démontrer l’intérêt de traiter la surdité avec un implant cochléaire. Cette technique qui consiste à insérer une électrode dans la cochlée, afin de stimuler le nerf auditif, est utilisée pour traiter environ 500 000 personnes dans le monde.
Les chercheurs espèrent que la cartographie de ces vaisseaux sanguins pourra aussi apporter de nouvelles connaissances sur les maladies auditives, comme la maladie de Ménière, la surdité soudaine et les acouphènes, dont les causes demeurent encore inconnues. Mais pour l’instant, il est impossible d’étudier des patients vivants avec cette technologie, à cause de à la trop forte intensité des radiations émises par les rayons X.

« Nous étudions des spécimens de personnes décédées, c’est-à-dire des dons d’os temporaux. Nous espérons que la technologie pourra être modifiée à l’avenir, pour obtenir une meilleure résolution qu’aujourd’hui », précise Helge Rask-Andersen.
Sources : https://www.nature.com/articles/s41598-020-62653-0 et https://www.uu.se/en/news-media/press-releases/press-release/?id=5026&typ=pm&lang=en

 

Lucile Perreau