Présidentielle 2017 : Le reste à charge au centre du débat politique

éLECTION PRéSIDENTIELLe

À deux mois d’une élection présidentielle à l’issue particulièrement incertaine, la Fédération nationale de la Mutualité française (FNMF) a convoqué un grand absent du débat politique : la santé.

Présidentielle 2017 : Le reste à charge au centre du débat politique

Thierry Beaudet, président de la FNMF  invitait mardi 21 février, cinq candidats à s’exprimer sur le sujet. Retour sur les différents engagements de trois d’entre eux, François Fillon (LR), Emmanuel Macron (EM) et Benoît Hamon (PS).
72 % des Français estiment que l’on « ne parle pas suffisamment de santé » dans la campagne électorale en cours. C’est l’une des conclusions d’un sondage commandé par la Mutualité, réalisé à l’aide d’un panel de 2000 personnes. Un absent particulièrement problématique puisque près de la moitié des interrogés évaluent l’accès aux soins pour tous comme l’une de leurs principales priorités. La question du reste à charge s’affiche également comme un argument de campagne incontournable. En effet, près de la moitié des sondés ont ressenti une hausse du reste à charge au cours des cinq dernières années, de façon plus significative que les frais d’hôpitaux ou de médecine généraliste. Une impression confirmée par les chiffres des comptes nationaux de la santé. L’effort des ménages pour rembourser leurs soins est passé de 12 milliards d’euros en 2001 à 16 milliards en 2015, soit une augmentation de 40 %.
Aussi, la FNMF qui a déclaré ne soutenir aucun candidat, s’est déjà prononcée contre un remboursement intégral des soins par l’assurance maladie, comme le prônait notamment le candidat du Front de Gauche Jean-Luc Mélanchon au mois de janvier dernier.

François Fillon : Le reste à charge zéro d’ici 2022
Le programme de santé du candidat de la droite et du centre était particulièrement attendu ce mardi. Outre sa fragilisation par l’enquête menée par le Parquet national Financier sur l’emploi de son épouse comme assistante parlementaire, l’ancien Premier ministre était l’un des seuls à avoir abordé ses intentions sur la question, dès les primaires, en décembre 2016. Le programme dévoilé à la Mutualité est moins polémique qu’attendu, lui qui avait annoncé « redéfinir les rôles respectifs de l’assurance publique et privée ».
Les 20 milliards d’euros d’économie sur l’assurance maladie à horizon 2022, et la réduction de 500 000 emplois dans la fonction publique sont toujours deux objectifs que vise par François Fillon, même si le dernier point a été nuancé : il ne s’agirait pas de postes de soignants, mais de postes administratifs. L’accent est donc mis sur la prévention, notamment avec la mise en place d’une consultation de prévention, pour tous les Français, tous les deux ans auprès de leur médecin traitant. François Fillon défend également une offre de « téléconsultation » sur tout le territoire d’ici l’année 2022.
Côté assurance maladie, le candidat Les Républicains prévoit, un reste à charge à zéro d’ici 2022 pour l’optique, les prothèses dentaires et les audioprothèses, grâce « à un partenariat entre la Sécurité sociale et les organismes complémentaires ». Il n’est toutefois plus question de franchise médicale universelle selon les revenus.

Emmanuel Macron : Rembourser les soins, même « anecdotiques »
Le reste à charge « zéro » d’ici 2022 figure également dans le programme de l’ancien ministre des Finances, Emmanuel Macron. Le fondateur du mouvement « En Marche ! » propose la création de trois contrats types de complémentaires de santé, non exclusifs, afin de favoriser la concurrence. Alliée à la transparence de la part des professionnels, ces deux facteurs permettraient, selon le candidat, d’atteindre un reste à charge nul après remboursement complémentaire, notamment sur les audioprothèses. Le candidat qui a assuré que cette mesure ne se traduirait pas par une hausse des cotisations.
 Emmanuel Macron entend bien « maintenir un objectif national des dépenses d’assurance maladie à 2,3 % sur 2018-2022 » soit « 15 milliards d’économies par rapport au tendanciel » ainsi qu’un « plan d’investissement dans l’hôpital et l’innovation médicale de 5 milliards d’euros ». 
Il s’est également engagé à ne « dérembours (er) aucun soin utile au cours du quinquennat. C’est la Haute Autorité de Santé (HAS) qui fera (…) un état des lieux des soins pour juger de ceux qui sont utiles et de ceux qui seront inutiles ».
La dépendance a également été évoquée par le candidat récemment rallié par François Bayrou. Il s’est prononcé pour une prolongation de la loi « vieillissement du 28 décembre 2015 », notamment en matière d’équipement en établissements pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).
 
Benoît Hamon : contre les « rentiers » du reste à charge
« Une fusée à plusieurs étages ». C’est la métaphore qu’a choisi Benoît Hamon, le candidat investit par la primaire de la gauche pour décrire son programme en matière de santé. Cette « montée en puissance » et ce « développement progressif » devraient selon lui, être évalués « au regard des économies que l’on fait par ailleurs ». Benoît Hamon s’est dit prêt à élargir « la complémentaire santé » engagée par François Hollande « aux fonctionnaires, retraités et étudiants qui n’en jouissent pas ». Il en va de même pour la couverture maladie universelle complémentaire (la CMU-C), qu’il souhaite automatiser « aux plus pauvres ».
Le point sur lequel il est le plus en rupture avec les autres candidats, serait sûrement son opposition à un désengagement de l’Assurance maladie, mais aussi à un « reste à charge de zéro », notamment sur l’audioprothèse, les lunettes et le dentaire. Pour lui, un tel remboursement entretiendrait « la rente (…) de ceux qui facturent très cher des prothèses auditives ou des lunettes ». S’il souhaite bel et bien « augmenter la part de remboursement de la Sécurité sociale pour le dentaire, l’optique et les prothèses auditives », Benoît Hamon invite cependant lui aussi, à plus de « transparence » sur les coûts du côté des fabricants, de façon à réduire les « marges » des praticiens et rééquilibrer leurs tarifs.
Benoît Hamon s’est également engagé à revoir le financement de l’hôpital public, notamment en adaptant la tarification à l’activité, la T2A, à promouvoir « l’incitation » plutôt que la contrainte pour lutter contre les déserts médicaux, ou à reconnaître l’épuisement professionnel, ou burn-out, comme maladie professionnelle.
 

Kessy Huebi-Martel avec l' APM