Les complémentaires santé dans le collimateur du quotidien Le Parisien

polémique

Sous le titre accrocheur, « Les complémentaires n’assurent pas tant que ça », Le Parisien en date du 16 février lance une lourde charge à l’encontre des Ocam.

Les complémentaires santé dans le collimateur du quotidien Le Parisien

Si elles sont aujourd’hui « Incontournables dans le système de santé : 96 % de la population en a une », les complémentaires de santé représentent surtout pour Le Parisien un marché « juteux »… Un marché de « plus de 33 milliards d’euros par an pour les assureurs privés, mutuelles et institutions de prévoyance, mais dont les Français ne perçoivent en retour que 26 milliards d’euros, du fait de frais de gestion parfois astronomiques (jusqu’à 28 %, selon la Cour des comptes) ».
Surtout, le journal pointe le manque à gagner pour l’État : 3 milliards d’euros. En cause, les contrats responsables qui bénéficient d’importants avantages fiscaux… Pourtant, ces contrats dits responsables « intègrent dorénavant des plafonds de prise en charge », s’indigne Le Parisien qui souligne : « Ces nouvelles conditions, les Français sont en train de les découvrir (…) et c’est la douche froide. » Avec des « garanties en baisse » et des « tarifs en hausse » (+ 13,1 % depuis 2011 selon l’Insee), les complémentaires se portent plus que bien explique le quotidien. « En 2013, elles ont dégagé 223 millions d’euros de profits. C’est peu, mais il faut y ajouter un trésor : les placements financiers et immobiliers. » Ce qui place la solvabilité moyenne des Ocam à 3,6 fois le plafond fixé par la réglementation. D’ailleurs, « si la réglementation prévoyait qu’elles publient leurs comptes à partir de 2012, la quasi-totalité des mutuelles cultive toujours le secret de leurs chiffres. », met en lumière Le Parisien qui donne la parole à Frédéric Bizard, spécialiste des questions sociales et de santé, économiste et professeur à Sciences-po Paris. Pour l’expert, « le monde des complémentaires n’est absolument pas transparent. Il en est de même pour leur gestion – coûteuse – et pour les contrats – incompréhensibles ».
Pour le rédacteur en chef du quotidien, Jean-Marie Montali, « L’évolution de notre système de santé favorise ces "organismes complémentaires de santé" à la gestion calamiteuse, aux pratiques commerciales plus que floues, aux tarifs de plus en plus élevés, alors que les remboursements le sont de moins en moins », explique-t-il dans son édito. Et de regretter : « Et, puisque l’autorité semble avoir abdiqué, il n’y a pas de raison que ça change »…

Un dossier n’est pas passé inaperçu du côté de la Mutualité française qui dans la foulée a publié un communiqué de presse de mise au point :

« Tarifs, remboursements : quand les mutuelles dépassent les bornes », titre en « une », Le Parisien/Aujourd'hui en France (pages 1 à 3), qui publie un dossier résolument à charge sur les prétendus « frais de gestion démesurés » et les « tarifs trop élevés » pratiqués par les complémentaires santé, tous organismes confondus.

Introduite par un éditorial au vitriol (page 2) sur les supposées « mauvaises manières » de ces opérateurs, cette parution monte habilement en épingle quelques témoignages d'assurés mécontents – certains n'étant d'ailleurs pas couverts par des mutuelles, mais par des institutions de prévoyance –, pour en tirer un certain nombre de généralités abusives.
Au final, ce dossier qui prétend révéler des « mauvaises surprises » égrène des contre-vérités sur les pratiques des mutuelles, en donnant en particulier la parole au pseudo-spécialiste Frédéric Bizard, surtout connu pour étriller à longueur de colonnes le secteur des complémentaires santé.

Sans prétendre rectifier la totalité des approximations véhiculées par cet article, quelques précisions méritent toutefois d'être apportées pour rétablir la réalité des faits.
Ainsi donc, les tarifs des complémentaires « continuent d'augmenter », dénonce le journaliste Daniel Rosenweg, qui évoque un chiffre erroné en créditant la FNMF. En réalité, selon l'enquête de la Mutualité française sur l'évolution des cotisations des mutuelles, les tarifs ont augmenté de 3,8 % par an en moyenne, entre 2008 et 2016.

Pourquoi une telle progression ? Sur la même période, la hausse tendancielle des dépenses d'assurance maladie (Ondam) s'est élevée à + 2,5 %. Si l'on y ajoute les augmentations successives des taxes prélevées sur les organismes complémentaires, qui pèsent pour 1,2 % dans cette évolution, on obtient sur la période une hausse mécanique de 3,7 %.
Autre accusation portée par cet article : les frais de gestions sont élevés ! D'après Frédéric Bizard, qui, dans un entretien, s'appuie sur une remarque de la Cour des comptes, « ils représentent plus de 25 % du chiffre d'affaires des complémentaires ».

Or, selon le rapport 2015 de la direction de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques (Drees) sur la situation financière des organismes d'assurance maladie complémentaire, sur 100 euros de cotisations santé perçues, les mutuelles reversent en moyenne 80 euros de prestations à leurs adhérents et mettent en réserve 1 euro pour faire face aux aléas et financer l'action sociale.

Leurs frais de gestion incluent en outre des dépenses liées à des services tels que le tiers payant ou celles des démarches contractuelles avec des professionnels de santé.
Manque de transparence, enfin ? « Si la réglementation prévoyait qu'elles publient leurs comptes à partir de 2012, la quasi-totalité des mutuelles cultive toujours le secret de leurs chiffres », croit savoir Daniel Rosenweg. Dans les faits, les mutuelles n'ont pas attendu la loi de financement de la Sécurité sociale de 2012 pour faire acte de transparence. Si ce texte met en place une communication standardisée sur les frais de gestion à destination de leurs adhérents, leur fonctionnement démocratique prévoit depuis toujours la publication annuelle de leurs comptes, dans lesquels figurent les frais de gestion, à l'occasion de leurs assemblées générales. Sans prendre en compte le contrôle scrupuleux exercé sur le secteur de l’assurance par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)… », conclut la Mutualité française.

La rédaction